Elle est là, la mer.
Ce n'est qu'aujourd'hui, jour de mon départ, que j'ai eu envie de la toucher.
Je m'avance vers elle d'un pas ferme. Je m'approche et me débarasse de mon sac, de ma veste, comme les amants qui au fur et à mesure qu'ils s'approchent du lit où ils se retrouveront se débarassent nerveusement, fébrilement de leurs vêtements.
Je relève mon pantalon, l'eau est froide mais vivifiante, je sens tout son influx pénétrer dans les pores de mes pieds.
Au loin, des îles, des îlots rocheux qu'une légère brume -mais s'agit-il de brume? Non, ce n'est pas cela, c'est comme un voile, enfin quelque chose comme ça- laisse deviner. Je vois un phare, je ne connaissais pas la côte bretonne. L'eau est bonne finalement.
Je re-remonte mon pantalon, et je m'avance, je m'enfonce dans l'eau, jubilatoire comme une enfant qui découvre la mer pour la première fois, au détour d'un chemin.
Je m'avance, encore, je m'enfonce dans l'eau, encore ...
Tout à coup, une voix: "Faites attention, vous allez mouiller votre pantalon ! ".
Je me retourne et je n'ai pas le temps de voir qui a parlé qu'une vague m'asperge complètement. Dure loi de l'océan ...
Une femme plutôt âgée éclate d'un rire sonore et communicatif. Je ris à mon tour. Je suis trempée, comme une rescapée qui vient d'être sauvée des eaux.
C'est un billet passablement humide que je tends dans la mesure du possible à la bénévole des Etonnants Voyageurs.
Depuis la salle, on voit la mer. Un bateau file sa course vers l'Angleterre. Il n'y a personne dans la salle, c'est étonnant alors que certaines sont archi-bondées avec une queue impressionnante. Jean-Marie Laclavetine vient d'arriver, le thème de la rencontre est "le voyage a-t-il une fin?". Dehors, une voix d'enfant: "Papa, regarde, le Mont Saint-Michel !" "Mais non, c'est le fort Vauban". Le bateau n'est plus qu'un point à l'horizon. La conférence va commencer.